Voilà ce que disait l’actuel garde des Sceaux Francais, Éric DUPONT MORETI dans «le Dictionnaire de ma vie», un ouvrage qu’il a écrit en 2016 : «Je plaide fréquemment que juger est une gageure, qu’avant d’espérer bien juger, il faut souhaiter juger le moins mal possible. Cette humilité-là, on l’a naturellement en tant qu’avocat, parce qu’on porte en soi cette culture du doute et que l’on tend la main pour recevoir. Mais lorsqu’on n’est le magistrat qui donne ou ne donne pas, on n’est évidemment pas dans la même posture. On est campé dans la position de celui qui tient les rênes , qui tranche, et ce pouvoir, on peut être porté à en abuser sauf à savoir infiniment de recul et de méfiance envers ses propres a priori».
Fort heureusement que le procureur n’est pas le juge et encore plus heureux qu’il ne tranche pas. Sauf que dans nos contrées d’Etat de droit à la peine, le procureur, surtout lorsqu’il est affublé de l’adjectif « spécial » près la CRIEF trouve facilement refuge auprès de juges. Ceux-là lui prêtent main forte et lui servent de rempart et de bras armés, dans sa démarche de destruction du droit et de violation systématique de la loi.
Cela fait six mois que l’ancien Premier ministre Ibrahima Kassory Fofana, croupit dans les geôles de la prison de Conakry, par la volonté affichée d’un homme, le procureur spécial, déterminé à lui nuire et il y arrive.
En premier, un mandat de dépôt des plus irréguliers de l’histoire judiciaire de guinée l’a conduit en prison et l’y a maintenu aussi longtemps qu’il a fallu l’y maintenir. Il y est encore !
Contre cette violation flagrante de la loi, le président de la CRIEF, saisi à l’époque pour constater la violation manifeste de la loi, pourtant conscient lui-même de l’irrégularité manifeste, a, contre toute attente, décidé de maintenir le mandat invalide. Il a plutôt invité l’ancien Premier ministre à comparaître par-devant la chambre de l’instruction.
Même lorsque cette dernière juridiction a fait le constat de l’absence de charges véritables à l’encontre de l’ancien Premier ministre, elle a néanmoins cru nécessaire, sans doute pour ne pas désobliger un procureur spécial en quête de sensationnel comme un parfait commandité, d’inculper Ibrahima Kassory et de le placer en liberté sous caution faramineuse.
Cette autre décision, déférée devant la chambre de contrôle de l’instruction, a contre tout bon sens, été infirmée puisque la décision attendue, devrait somme toute contenter le procureur spécial, ce qui fut fait !
Bis repetita…la chambre de contrôle, en raison de l’appel du procureur spécial contre la troisième décision de mise en liberté prise par la chambre de l’instruction, va être à nouveau saisie.
À nouveau, elle volera vraisemblablement et très probablement au secours du procureur spécial.
Cela ne devrait nullement étonner.
De façon publique et à l’occasion de ses nombreuses sorties médiatiques, le procureur spécial n’a pas fait mystère de ses liens supposés et suspectés d’amitié et de grande cordialité avec, notamment, le président de la chambre de contrôle.
Est-ce, ce qui explique la position ultime, qui permet à cette juridiction et à son président de se hisser en rédempteur de la volonté du procureur spécial ? L’on est en droit de s’interroger au bout de trois fois que cela se passe.
Contre une telle attitude, rien d’autre que la récusation qui est une procédure permettant d’anéantir de tels agissements. Simplement, les conseils de Dr Ibrahima Kassory Fofana auront-ils la volonté et la détermination de pousser jusque-là ? Il semble d’ailleurs que les membres qui composent cette défense sont en pleine réflexion pour revoir de fond en comble, aussi la composition que les stratégies de défense ainsi que les actions de défense en vue de la rendre plus efficace, plus pertinente tant ils sont déterminés à aller de l’avant pour faire libérer leur client.
Les jours à venir seront déterminants des suites.
Mamady Condé, Juriste.