<<Propos d’un universitaire sur l’incompétence de la Cour suprême et l’irrecevabilité d’une requête en matière de contentieux de l’interprétation d’un Arrêt>>.
Le contentieux de l’interprétation et de l’appréciation de la légalité d’un acte ou d’une décision est une voie de recours en matière de contentieux administratif. Pour s’en convaincre il faut se référer au document phare du Baron du contentieux administratif, l’un des précurseurs « Édouard LAFFERIERE » dans l’œuvre intitulée <<TRAITE SUR LA JURIDICTION ADMINISTRATIVE ET LES RECOURS CONTENTIEUX>> paru en 1887. Dans cette œuvre, le grand maître dit que les recours contentieux en matière Administrative sont au nombre de quatre :
1. Le contentieux de l’annulation ;
2. Le contentieux de la réparation ;
3. Le contentieux de la répression ;
4. Le contentieux de l’interprétation et de l’appréciation de la légalité.
Il va de soi que le point 4 relève du contentieux administratif. D’ailleurs, lorsque le Doyen Léon DUGUIT systématisait les voies de recours à sont tout, il a fondu les quatre de LAFFERIERE dans ses deux voies connues en contentieux objectif et en contentieux subjectif.
La Guinée s’est rangée dans cette dernière classification. D’ailleurs, l’examen de la loi organique relative à la Cour suprême démontre que cette juridiction n’a aucune compétence d’interprétation d’un arrêt ou d’une décision de justice à moins qu’elle soit saisie en matière consultative. En pareil cas, aucune réquisitoire n’est permise. Le réquisitoire rentre sous l’angle contentieux. Ce qui fait l’incompétence de la Cour suprême en la matière (1). A pousser plus loin, il y a irrecevabilité de la requête (2).
1. Sur l’incompétence de la Cour suprême à connaître de l’interprétation d’un Arrêt
L’examen de la loi organique relative à la Cour suprême ne prévoit nulle part le recours en interprétation d’un arrêt (décision de justice). En consultant les dispositions afférentes aux attributions de la Cour suprême, le constat est frappant. L’article 37 portant sur les attributions de la Chambre pénale ne fait nullement mention de cette compétence. On parle de compétence en la matière de pourvoi en cassation.
Mieux même l’article 40 afférent aux attributions des chambres réunies ne fait cas d’une telle compétence. C’est une hérésie.
Pire, il est hors de question que soit utilisé l’article 98 portant sur les Dispositions spéciales afférentes au recours en interprétation et appréciation de la légalité pour introduire une requête en interprétation d’un arrêt. C’est une déroute.
L’alinéa 1 qui définit ce recours parle d’incident de procédure. C’est le moment où celà est possible. L’incident n’intervient que dans une audience, une instance de jugement. Or, ici il n’y a plus d’instance. La Cour suprême a rendu son arrêt en dernier ressort. Pour ce ce qui de l’acte d’un le recours en interprétation est possible, c’est un acte administratif, une décision des autorités exécutives pour ne pas dire Administratives. Pour preuve, l’alinéa 2 de l’article 98 précisant qui a la qualité de requérant en la matière parle clairement d’un acte ou d’une décision des autorités exécutives. Mieux ce type de Contentieux n’existe que dans le cadre du contentieux administratif, sous le prisme des actes et des décisions administratives comme l’avait démontré LAFFERIERE.
D’ailleurs, la dernière partie de l’alinéa 1 parle d’un texte ou d’une décision soulevée devant le juge afin qu’il puisse indiquer la portée où la légalité. Ce qui veut dire même qu’un recours principale est impossible. C’est un. recours accessoire. Or, la requête du Procureur spécial près la CRIEF est à titre principal. Et dans ce contentieux il n’est visé que les actes administratifs, car il n’y a pas d’exception d’interprétation d’une décision de justice en matière judiciaire. Celà n’est possible que dans le cadre consultatif. La compétence de la Cour suprême guinéenne n’y est pas.
2. Sur l’irrecevabilité de la Requête du procureur spécial près la CRIEF à la Cour suprême sur l’interprétation d’un Arrêt
L’irrecevabilité repose sur la disposition visée pour intenter le recours lui même nonobstant l’incompétence de la Cour suprême en la matière.
Se focalisant sur l’alinéa 2 de l’article 98, on se rend compte que c’est une juridiction d’instance et non un parquet ou une partie qui peut saisir la Cour suprême en matière d’incident de procédure afférente à l’interprétation ou l’appréciation de la légalité. C’est le renvoi de la juridiction.
Le terme juridiction fait état de la juridiction de jugement et non tout autre organe fut il juridictionnel.
Or, la qualité de requérant est une condition de recevabilité de toute requête devant la cour suprême.
Il y a par conséquent, une irrecevabilité si la juridiction arrivait à se déclarer compétente.
Dr Mouhamoudou Diallo Docteur en Droit Public Avocat à la Cour