Pour le progrès d’une nation ou d’un peuple, plusieurs facteurs rentrent en ligne de compte sous différents plans: social, culturel, économique et scientifique. C’est en cela on dit que le développement est multifactoriel. Les deux premiers facteurs ont des caractéristiques différentes selon les peuples ou les sociétés.
Le dernier élément qu’est la science, est cette œuvre qui facilite la vie à l’homme, elle lui permet de comprendre et connaitre mieux le monde. Dans le temps ancien par exemple, nous voyagions à cheval. De nos jours, c’est dans les engins roulants, volants et flottants que nous voyageons.
En jetant un coup dans le passé, nous pouvons affirmer qu’il n’y a aucun peuple où la science n’a pas existé et n’existe pas. Mais les niveaux de progrès dans la découverte scientifique sont différents. Ce qui veut dire, qu’il y a des peuples ou des sociétés qui sont en avance dans le domaine scientifique que d’autres : Tel est le cas du peuple africain, comparativement aux peuples du monde Occidental, Européen etc.
Comment la découverte et la transmission de ce savoir-faire s’effectuent ?
Précisons que la découverte scientifique n’est pas forcément liée à la langue. Elle est complètement indépendante d’elle, puisque la langue n’est qu’un moyen pour expliquer et transmettre le savoir. En d’autre terme, elle se définit comme un système d’expression utilisée par un groupe de personnes. C’est à travers la langue, qu’une communauté ou un peuple transmet ses savoir-faire et savoir-être. C’est également, via elle qu’on transmet les connaissances scientifiques, qu’elle soit à écrite ou à orale.
Etant donné que, par la nature des choses, il y a plusieurs groupes de personnes, donc de langues différentes selon l’espace et le temps, l’apprentissage scientifique sera alors diffèrent selon les langues, mais le contenu reste le même. Car le résultat de 5+15 en malinké sera le même en anglais ou en chinois. Les découvertes scientifiques se font par la curiosité et par la matière grise, et non par la langue, en ce sens où, la langue n’est qu’un moyen de transmission de nos pensées. Donc, la science n’est pas liée à la langue, mais à la recherche. La bonne compréhension et la bonne maîtrise de cette science n’est facile et simple qu’à travers sa langue maternelle.
Prenons un autre exemple sur la construction d’une maison. Le premier à construire une maison n’a pas appris de quelqu’un. Il n’a travaillé que sa matière grise pour y arriver. Puis, il transmettait son savoir-faire par des pratiques ou oralement (langue).
En effet, les choses évoluant dans le temps et dans l’espace, nous avons assisté à l’organisation massive (l’école) pour transmettre les savoir-faire et savoir-être aux jeunes générations. Chaque société avait son système d’organisation à cet effet et chacune d’elle faisait l’enseignement dans sa propre langue.
Cependant, en Afrique, c’est au cours de l’histoire que nous avons assisté à une réorganisation du système éducatif de chacune des sociétés africaines par contrainte (colonisation). Tout sera pratiquement chamboulé et bouleversé (le contenu et le contenant de l’enseignement).
En Afrique dite francophone précisément, la plupart des premiers écoliers seront formés uniquement que pour être des interprètes. Cela continua des décennies, et c’est l’apprentissage des matières littéraires qui seront encouragées.
Plus de 60 ans après la colonisation, nous continuons à transmettre les savoirs dans la/les langues étrangères, sous prétexte de maîtriser la science. Or, nous ne maîtrisons point pour l’heure nonobstant ces décennies d’apprentissage dans les langues d’autrui.
C’est ce qui suscite l’interrogation sur le canal de transmission de ces connaissances scientifiques.
Il s’avère alors que la cause principale de la non maîtrise de la science et de la technique du peuple africain est que les langues d’enseignements soient les langues étrangère. Beaucoup de spécialistes de l’éducation en ont déjà parlé dont voici l’illustration de quelques-uns:
- «Un enseignement qui serait donné dans une langue maternelle permettrait d’éviter des années de retard dans l’acquisition de la connaissance. Très souvent l’expression étrangère est comme un revêtement étanche qui empêche notre esprit d’accéder au contenu des mots qui est la réalité. Le développement de la réflexion fait alors place à celui de la mémoire. » Cheik Anta Diop.
- «Ce qu’on peut apprendre à travers une étrangère en trois ans, nous pouvons l’apprendre dans notre langue maternelle en seulement trois mois ». Kanté Solomana
- «Les enfants apprennent mieux lorsque la première langue d’enseignement est leur langue maternelle ». (Benson, 2004 ; Bühmann et Trudell, 2007 ; Pinnock, 2009a, 2009b)
Une partie de la synthèse des experts en éducation de lUNESCO vient conforter tout cela:
« Lorsque la langue utilisée à l’école n’est pas la première langue parlée par les enfants, le risque de déscolarisation ou d’échec dans les petites classes est plus élevé ». il affirme également : « Il est de plus en plus admis que les langues jouent un rôle vital dans le développement : gages de la diversité culturelle et du dialogue interculturel, elles sont aussi un moyen d’atteindre une éducation de qualité pour tous et de renforcer la coopération, de bâtir des sociétés du savoir inclusives et de préserver le patrimoine culturel, et de mobiliser la volonté politique en faveur de l’application des bienfaits de la science et de la technologie au service du développement durable ».
Nous comprenons aisément alors, cette pensée de Cheik Anta Diop: « Aucun people sérieux ne peut prétendre se développer dans la culture et la langue d’autrui. »
Il n’est pas du tout exclu d’apprendre d’autres langues, cependant, l’enfant doit commencer à apprendre dans sa langue. Toutes les nations dites? Développées connaissent ce principe et l’applique à la lettre. Seule l’Afrique n’a pas encore compris cela, soit elle ne veut rien entendre ou semble ne pas encore être prête à se rendre compte de cette évidence.
Si l’Afrique veut maîtriser la science et la technique, il n’y a pas mille chemins, il faut qu’elle enseigne dans ses langues.
Ibrahima Loncebalitè Konaté, Sociologue, Auteur et traducteur en Nko, Acteur de la Société Civile Guinéenne, Sekoutouréiste ou Panafricaniste.
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