Assurément, c’est la traversée du désert pour les médias Guinéens. Depuis des jours, les journalistes se battent contre le brouillage des ondes de plusieurs radios. Des actions de protestations sont annoncées dans les jours à venir par les associations de presse et le syndicat pour dénoncer cette pratique liberticide. Pendant ce temps, Djoma TV et FM sont coupées sur le bouquet Canal+ sur instruction de la Haute Autorité de la Communication, pour des raisons de sécurité nationale. Visiblement, c’est une opération d’extinction des médias qui vient d’être lancée par le pouvoir militaire de Conakry.
Que dire ? Que faire dans un pays où les dirigeants sont hostiles aux critiques et à la vérité ? Un pays où le droit à l’information est considéré comme une banalité ? Un pays où l’existence des médias libres est menacée et assujettie à des compromis au risque de disparaître ? La transition en cours, pour les médias Guinéens, est devenue malheureusement une traversée du désert qui semble plus longue et ennuyeuse.
Pour les maîtres du moment, l’exercice du journalisme doit se faire désormais à leur seule volonté et désir. Dire ce qu’ils veulent entendre et faire ce qu’ils peuvent aimer. Dans un tel schéma, c’est un retour en arrière, un recul de la démocratie et de l’Etat de droit. Manifestement, une volonté de faire asseoir un pouvoir autoritaire et autocratique dont l’existence n’appartient plus qu’au passé lointain.
Ordinairement, quand un média ou un journaliste viole les principes d’éthique et de déontologie, la loi détermine la conduite à tenir pour le rappeler à l’ordre ou le sanctionner tel que prévu par les textes.
Mais ce qui se passe maintenant est un phénomène nouveau, une pratique rétrograde et un abus de pouvoir sans précédent.
Il faut se questionner, il faut s’en inquiéter et le Colonel Doumbouya doit s’en méfier et s’en éloigner. Il n’est pas encore trop tard pour faire la sourde oreille aux mythomanes qui pensent pouvoir se camoufler dans les pratiques sordides derrière le silence ou l’extinction des médias.
L’heure est grave pour la survie des médias. Il faut nécessairement et impérativement prendre la mesure de la situation, pour faire arrêter cette mélancolie qui ne promet autre que l’enterrement de la presse libre et indépendante dont l’existence est vitale et dont le rôle est fondamental et capital dans la vie de notre République.
Cher Colonel, les médias Guinéens vous font part de cette vérité pour dénoncer les velléités commandités pour tenter de le museler.
Ces autorités déterminées à nous réprimer, n’ont autre volonté que de fragiliser pour paralyser la vie dans notre société. Il y a encore des Guinéens, qui pensent que vous n’allez jamais vous prêter à ce jeu honteux.
Cher Colonel, ces médias qui sont en train d’être muselés n’ont autre arme que la sagesse du comportement et la force des mots pour informer, dénoncer, éduquer, sensibiliser, critiquer et proposer. Jamais ils ne sauront porter atteinte à la dignité, à l’équité, à la solidarité, à la sécurité et à l’intégrité devant une haute autorité censée les contrôler et protéger.
Il faut dire, les médias dans un Etat, sont ce que représente l’oxygène dans un corps humain. Éteindre les médias dans un pays est un risque qui doit inquiéter. Dans une République qui se doit d’être au service du peuple, l’information est un bien public. Et ce bien public est indispensable au bon fonctionnement de la démocratie. Cela étant, on doit permettre à son peuple de se faire entendre plutôt que de le contraindre à se taire.
Il faut savoir raison garder. A bon entendeur, salut !
Mamoudou Babila KEITA