Les avocats commis par l’opposition guinéenne sont à pied d’oeuvre pour faire traduire Alpha Condé devant la cour pénale internationale. Le dossier déjà « concocté » est accablant contre le président Condé. AC vous donne en exclusivité la lettre envoyée à l’UE et à la CPI:
En notre qualité d’avocats du Front National de Défense de la Constitution, en abrégé FNDC, qui regroupe l’ensemble des partis et des mouvements politiques de l’opposition guinéenne ainsi que les représentants qualifiés de la société civile, nous avons l’honneur, mon Confrère Antoine CECCALDI, du Barreau de Marseille et moi-même, de vous exposer les faits suivants :
Le 22 mars 2020 s’est tenu en République de Guinée un double scrutin aux fins, d’une part de renouveler le mandat de l’Assemblée nationale, venu à terme le 28 décembre 2019, d’autre part, d’adopter par voie référendaire une réforme constitutionnelle dans le seul but de permettre au Président Alpha CONDE de briguer un troisième mandat à l’élection présidentielle d’Octobre 2020, ce que la Constitution actuelle lui interdisait, en application au surplus, d’une règle commune adoptée par la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest – la CDEAO dont la Guinée est membre.
Elu dans des conditions controversées, pour la première fois le 7 novembre 2010, il sera réélu le 10 octobre 2015.
Dans un rapport rendu public le 13 novembre 2019, l’ONG Amnesty International a souligné qu’au cours de cette période, plus de 421 personnes ont été tuées et des milliers d’autres blessées lors de manifestations politiques ou sociales en Guinée.
La violence excessive des forces de l’ordre, forces armées, de gendarmerie et de polices confondues, exercée dans la plus totale impunité, et la répression y afférente se sont amplifiées depuis le mois d’octobre 2019, date de l’annonce de la tenue de ce double scrutin.
Malgré les avertissements unanimes de la communauté internationale dénonçant le fait que les conditions d’organisation de ce double scrutin constitueraient une violation grave des règles démocratiques d’un Etat de droit, les autorités guinéennes, contre toute raison, en maintenaient le principe et la tenue.
En effet, le droit de suffrage a pour corollaire, dans la conception de la démocratie pluraliste, la tenue d’un scrutin garant de la libre expression de l’opinion du peuple, ce qui implique que le fichier électoral, qui en est l’assise matérielle, reflète fidèlement le corps des citoyens en droit de voter et d’être consultés dans le cadre d’élections et/ou d’un suffrage.
L’Organisation Internationale de la Francophonie – OIF – a contrôlé la compatibilité du fichier électoral, géré par la CENI, avec l’intégrité et l’effectivité de la procédure électorale concernant le double scrutin.
Son rapport, accablant, critiquait très sévèrement le fichier électoral, dans sa constitution, son état et sa tenue et préconisait d’en éliminer près de 2.500.000 d’inscrits, soit quasiment un tiers du corps électoral !
L’Organisation relevait d’autres irrégularités tels que des doublons persistants, des électeurs avec plusieurs cartes, des mineurs inscrits sur les listes électorales et le fait que, après épuration du fichier, 2.000.000 d’électeurs inscrits sur les 5.000.000 restants auraient pour seul pièce justificative une attestation contresignée.
Le rapport observait également une concentration d’anomalies dans la région de Kankan en Haute Guinée, réputée favorable au pouvoir en raison de l’homogénéité ethnique de sa population, en mettant en parallèle l’augmentation de la population en 5 ans – + 54 % – avec le faible nombre de décès – 0,44 % – au cours de la même période.
Les conclusions de ce rapport ont été reprises par la communauté internationale et à la suite l’Union africaine, la CDEAO, l’OIF et l’Union européenne, ont refusé d’envoyer des observations pour suivre le processus électoral.
Pour échapper aux conséquences politiques et financières d’un isolement total, les autorités guinéennes ont été contraintes de reporter à une date ultérieure le scrutin du 1er mars 2020.
Ce report a permis à la CDEAO de dépêcher une mission d’experts dont le rapport reprendra les conclusions de l’OIF avec suppression du fichier électoral des 2.500.000 électeurs inscrits frauduleusement.
Le 22 mars 2020, contre toute raison – situation politique intérieure tendue à l’extrême, propagation du coronavirus, condamnations internationales – les autorités guinéennes organisaient le double scrutin.
Il se déroulera en milieu clos, hors la présence d’observateurs neutres aptes à contrôler que le fichier électoral avait été effectivement épuré.
Cette exigence d’un contrôle neutre et objectif de l’état réel du fichier électoral était d’autant plus nécessaire que l’OIF avait affirmé dans son rapport que « la CENI ne dispose pas d’une structure technique professionnelle indépendante des aléas politiques ».
Le bilan des violences électorales et post électorales du double scrutin est très lourd :
Au moins douze morts à Conakry,
des blessés en grand nombre,
une cinquantaine de morts avec présence de charniers à Nzérékore.
Ce bilan a pour cause l’usage d’une force excessive, indue et illégale par les unités de l’armée, de la gendarmerie et de la police qui n’hésiteront pas à tirer à balles réelles sur les opposants au double scrutin.
A l’origine de ce climat de guerre civile et de violences, on trouve les déclarations du chef de l’Etat et des représentants de la mouvance présidentielle qui ont multiplié depuis le mois d’Octobre les appels à la violence, aux divisions et aux confrontations ethniques comme à Nzérékore.
Dans un tel contexte, les résultats de ce double scrutin sont dénués de toute crédibilité.
Le manque total de sérieux de cette consultation, organisée selon des méthodes en vigueur en Union Soviétique et en Corée du Nord, a été dénoncé par la France et l’Allemagne dans une déclaration commune, l’Union européenne et les Etats Unis dont l’Ambassade en Guinée a souligné : « à la lumière de nos observations et au regard des rapports du gouvernement faisant état de la fermeture et de la destruction de bureaux de vote, le taux de participation – 61,18 % – et les résultats proclamés – 91,59 % de oui au projet de réforme constitutionnelle – suscitent des interrogations portant sur la crédibilité du scrutin ».
Il en résulte que depuis le mois d’Octobre 2019, les homicides commis à grande échelle dans le cadre d’une répression meurtrière, les disparitions forcées, les attaques systématiques et généralisées, sur la base de critères ethniques, contre la population civile sont autant de crimes contre l’humanité passibles de la Cour Pénale Internationale (CPI).
Les actes de violence et d’intimidation commis contre les journalistes, les professionnels des médias et les représentants de la société civile, les détentions arbitraires constituent également des violations flagrantes et systématiques des droits de l’homme et il sera rappelé ici que la République de Guinée figure à la 101e place sur 180 pays au classement de la liberté de la presse de 2019.
Il n’est pas possible d’accepter la perpétuation de tels faits sauf à considérer que certaines autorités publiques peuvent impunément s’exonérer des obligations impératives tirées des règles et des principes de l’ordre public international.
Les responsables de la situation actuelle et des crimes commis au cours de la période considérée sont :
Le Président Alpha CONDE, chef des armées et plus haute autorité de la République de Guinée dont la qualité ne l’exonère en aucun cas de la responsabilité pénale des actes commis par les chefs militaires ou de la police placés sous ses ordres et exécutant ses instructions,
Ibrahima khassory Fofana chef du gouvernement pour, d’une part, avoir planifié la tenue du double scrutin, d’autre part, en avoir organisé la fraude en sachant qu’on avait des raisons de savoir qu’en application de la politique de son gouvernement des crimes et des violences illégitimes seraient commises contre les opposants à cette double consultation.
Mamady DIANE, Albert, Damantang CAMARA, le Général Boureima CONDE, respectivement Ministre de la défense nationale, Ministre de la sécurité, Ministre de l’administration du territoire qui, chacun en ce qui les concerne, on exercé et exercent, en leur qualité respective, des fonctions hiérarchiques sur les forces militaires et de sécurité disposant à ce titre, de facto et de jure, de donner des ordres afin de prévenir des infractions commises par ces forces et d’en sanctionner les auteurs, ce qu’ils se sont volontairement abstenus de faire,
Amadou Damaro CAMARA, Député et Président du Groupe parlementaire Arc en Ciel à l’Assemblée nationale, dont les déclarations publiques ont aidé et encouragé les décisions ethniques à l’origine desquelles des crimes et violences ont été planifiés notamment dans la ville de Nzérékore.
Dans les faits, il est de l’ordre de l’évidence que les autorités guinéennes se sont affranchies, avec un rare mépris, des conseils, recommandations et avertissements prodigués notamment par les Nations-Unies, l’Union européenne, les Ambassades des Etats-Unis et de la France, dans une déclaration commune du 5 novembre 2019, et la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, qui a relevé, de son côté, notamment que, dès les 14 et 15 octobre 2019, les forces de sécurité « n’ont pas respecté les normes et standards internationaux en matière d’usage de la force ».
Par voie de conséquence, il convient désormais pour prévenir les violations futures des droits de l’homme de punir les responsables de ces actes répréhensibles, aux fins de les contraindre à respecter les obligations qui leur incombent en vertu du droit international, y compris le droit international humanitaire, le droit des droits de l’homme et des instruments internationaux (Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, Pacte international des droits civils et politiques, Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, Accords de Cotonou) qui en assurent la protection,
C’est pourquoi, il est demandé à la Commission de prononcer le gel des avoirs qui sont détenus ou contrôlés, directement ou indirectement par les personnes désignées ci-dessus ou par des personnes ou entités agissant pour leur compte ou sous leurs ordres, ou par des entités détenues ou contrôlées par eux et de leur interdire tous voyages et/ou déplacements, quel qu’en soit le motif ou la cause sur le territoire de l’Union.