La Société Guinéenne de Palmiers à huile et d’hévéas (SOGUIPAH), jadis fleuron de l’industrie nationale, s’enfonce peu à peu dans les abysses de la dégénérescence. Plus de 3.500 travailleurs et des milliers de familles, tirent depuis trois décennies, leur sève nourricière de la SOGUIPAH, une société portée sur les fonts baptismaux de l’industrialisation éclairée à l’époque du régime de Sékou Touré. Un trafic illégal des récoltes de la SOGUIPAH, vers le Liberia a fini par empirer la situation économique de la société.
Le départ de Mariama Camara et l’arrivée de Michel Beimy, n’ont pas stoppé la descente aux enfers de la Soguipah. Les salaires tombent en retard, les licenciements à l’emporte-pièce, les recrutements à l’aune du militantisme et bien d’autres faits qui plombent la société.
Par-dessus tout, ce qui inquiète, c’est la naissance d’une florissante contrebande autour du latex produit par les hévéas de Diecké et de Bignamou. Les travailleurs, harassés par le retard du paiement de leurs produits, préfèrent depuis un certain temps, les écouler au Liberia voisin, via la frontière terrestre, avec la complicité de certains agents en uniformes.
Ainsi, les efforts d’encadrement technique et les investissements effectués par l’Etat Guinéen, sont sapés au profit du Liberia voisin. Le Trafic a pris une telle proportion que le partenaire Belge de la Guinée, SOFICO, a ouvert sur le territoire Libérien, une autre unité industrie pour happer les récoltes détournées de la Guinée.
De nombreux transporteurs, ouvriers, planteurs, sont tous à fonds dans ce trafic, sans peut-être se rendre compte qu’ils bradent ainsi les fruits d’un patrimoine national. Les récoltes ainsi détournées de la Guinée, sont revendues au Liberia trois fois moins chères mais, les contrebandiers préfèrent cela que d’attendre des semaines, voire des mois avant d’être payés par la SOGUIPAH.
Le risque que la Guinée encourt est énorme. L’unité industrielle construite sur place et qui emploie des centaines de personnes, risque de mettre la clé sous le paillasson par faute de matière première. Les quelques 3.500 travailleurs de la SOGUIPAH, pourraient dans un proche avenir, se retrouver dans la rue car, à cette allure, la société risque de fermer.
La crise humanitaire qui naitra alors dans cette partie de la Guinée forestière, sera comparable à celle de la ville de Fria, jadis. L’autre risque non des moindres, est d’ordre sécuritaire. La frontière entre la Guinée et le Liberia, est assez poreuse et ce trafic de caoutchouc, a créé un réseau puissant de contrebandiers sur les deux territoires. Démanteler un tel réseau qui a ses tentacules au Liberia, un pays qui a connu une sanglante guerre, n’est pas chose aisée.
Le nouveau Directeur de la Soguipah, devrait se pencher sur cette situation, en attirant l’attention du président Alpha Condé, au lieu d’opérer des compressions alambiquées au sein du personnel.
Mathieu