La jeunesse est l’avenir d’une nation, dit-on. Cette pensée fait l’unanimité dans tous les États du monde. Sauf qu’en Guinée, au regard de certaines situations et des réalités spécifiques propres à notre pays, ce qui peut être vrai ailleurs, peut ne pas l’être chez nous, vice-versa. Cela ne doit aucunement étonner, car l’Éducation qui est la clé de la réussite des jeunes, est carrément à terre depuis des lustres. Alors, par quel miracle la jeunesse Guinéenne peut-elle rassurer qu’elle est véritablement l’avenir de ce pays ?
Nous voici à l’exercice pour tenter de s’affranchir de certaines formules et doctrines anciennes qui ne cessent d’occuper jusque-là, la pensée de la jeunesse guinéenne. Des pensées du genre : c’est ce que j’ai appris de mon père ou de mon maître. Lui aussi l’a appris de son père qui à son tour, l’a appris du grand-père de son père. Oubliant que les vérités d’hier peuvent être des mensonges d’aujourd’hui.
En Guinée, c’est toujours la même chose dans nos écoles. Le système qu’on dit avoir réformé n’a eu de mérite que la malformation des apprenants. Les écoles sous les manguiers de la période coloniale ont été plus efficaces que celles qui sont en immeubles aujourd’hui dans nos villes.
En 1958, il n’y avait pas d’enseignement supérieur en Guinée. Mais les cadres de la révolution valaient mieux que la plupart des détenteurs de doctorats et de professorat d’aujourd’hui.
À leur époque, tout le pays ne comptait que 20 écoles avec un effectif de 4.557 élèves. Une école desservait une superficie moyenne de 1000 km². Les écoles étaient rares mais très efficaces dans l’éducation des enfants du pays. Les enseignants quant à eux, se comptaient au bout des doigts, mais leurs connaissances ont éclairé plusieurs générations. Le dynamisme, la qualité et le sérieux du système éducatif d’alors, ont permis de préparer cette époque que nous traversons.
Nous sommes en 2023, combien d’écoles dispose notre pays aujourd’hui ? Quel est le nombre total d’élèves ? Même le MPUA ne pourrait répondre à cette question avec exactitude.
Pire, les programmes enseignés dans ces écoles, ont pour la plupart le même âge que la colonisation. Quel est donc cette jeunesse qu’on considère comme l’avenir de ce pays ? Une jeunesse de l’époque de la 4e révolution industrielle à qui on continue d’enseigner la préhistoire version des colons, la littérature française et la civilisation européenne, peut-elle rivaliser les petits Chinois, Coréens et sud-africains qui sont désormais portés sur la découverte d’autres cieux ?
Au lieu d’enseigner les enjeux actuels des relations internationales, on continue de dispenser l’histoire des relations internationales.
Pendant que les bibliothèques numériques sont en expansion dans le monde, nos bibliothèques sans ordinateurs, sont toujours remplies par des documents des auteurs du 17e, 18e et 19e siècles.
Nos étudiants en médecine apprennent toujours en théoriciens, pendant que ceux d’ailleurs apprennent désormais à opérer à distance.
Les techniciens qualifiés dans le secteur minier qui porte notre économie, sont essentiellement des étrangers pendant que le pays continue de nous former pour être des employés subalternes.
On parle des technologies innovantes, des sciences numériques et des techniques modernes pendant que nos professeurs utilisent toujours la craie au tableau.
En 1960, le budget alloué à l’éducation guinéenne était de 1.522 millions en dépenses et en investissements. C’était le quart du budget national. Le pays en a obtenu des résultats très satisfaisants.
En 2023, dans la loi des finances initiale, le budget de l’enseignement pré-universitaire se chiffrait à plus de 2.74 milliards. À l’enseignement supérieur, nous étions à plus de 1.86 milliards. Mais quels sont les résultats ?
Comment comprendre que les produits des écoles élémentaires coloniales, malgré les moyens rudimentaires pour ne pas dire inexistants, soient meilleurs que ceux qui sortent de nos universités actuelles ? Devons-nous continuer à former des chômeurs ?
Devons-nous continuer à dispenser des programmes caducs ? À délivrer des diplômes sans valeur ?
Avec une telle réalité, cette jeunesse d’aujourd’hui, ne pourrait être l’avenir de demain, mais plutôt, la proie d’une nouvelle forme de colonisation intelligente aux moyens des techniques et des nouvelles technologies.
La jeunesse guinéenne doit se libérer de certaines pensées dogmatiques et démagogiques dans la médiocrité pour réfléchir, savoir et comprendre. Il nous faut avoir des rêves qui créent des ambitions. Des ambitions qui nous emmènent à apprendre, apprendre pour pouvoir entreprendre et entreprendre pour réussir. Cela passe forcément par l’éducation. Mais surtout une éducation de qualité de la base au sommet.
Mamoudou Babila KEÏTA