Informer le peuple est un devoir régalien de tout journaliste. Pour ce faire, il lui revient de mieux travailler sur tout le paramétrage nécessaire pour informer celui qui en a besoin. De ce fait, il est possible de trouver l’information partout, soit à la radio, à la télévision, sur le web, sur les réseaux sociaux, dans la rue, dans les journaux. Ce que nous entendons, lisons, produisons, partageons, regardons exerce une influence sur nos réflexions, sur nos actions et sur notre perception du monde. Mais les journalistes qui sont censés informer tiennent-ils compte de l’intérêt public ? Parcourons ensemble pour voir les traits importants sur l’intérêt public à la différence de l’intérêt du public afin de mieux créer de l’impact au sein de la société en matière d’information.
En effet, pour informer le peuple de manière professionnelle, il est demandé aux hommes de médias de respecter la vérité, informer de manière indépendante, agir avec loyauté, respecter les droits des personnes, etc. Ils (journalistes) ne doivent pas se presser comme les autres citoyens pour informer, il faut nécessairement se démarquer en suivant ce canevas : collecter-traiter-diffuser avec le maximum de prudence.
A l’ère où les médias se multiplient du jour au lendemain, parfois qui poussent comme des champignons, il faut strictement faire du meilleur journalisme qui pourrait être plus approfondi, plus documenté, plus vérifié, plus discuté de manière participative. Ceci dit pour faire appel à des lecteurs, auditeurs, téléspectateurs ou internautes, les médias doivent proposer un contenu qui n’est pas le même chez tout le monde car c’est ce qui est la particularité de leurs activités : le devoir d’informer. Sinon à quoi sert de dire ce que tout le monde répète tout au long de la journée ou au quotidien ?
C’est pourquoi dans l’univers du numérique, n’oublions pas que nous nous adressons à un public qui sait déjà sur beaucoup de choses. Ce public écoute, entend, suit et interprète. Il est à la fois connecté sur les réseaux sociaux de manière permanente et suit certains médias. Et donc vouloir répéter ce que tout le monde dit n’a rien d’intérêt. Pourtant le contenu de l’information proposé doit avoir de la plus-value, apporter quelque chose pour le consommateur qu’on ne peut pas avoir ailleurs. Ce qui revient à dire qu’il faut le maximum d’efforts pour mieux faire son métier, car les journalistes ont le devoir d’informer et le public a le droit d’être informé. De ce fait, nous journalistes sommes priés de fournir énormément de sacrifices pour aller fouiller en profondeur et partager les résultats obtenus avec nos cibles qui nous donnent de la valeur ajoutée dans l’exercice de notre métier.
Vous conviendrez avec moi, dans une boîte où il y a 10, 15, 20, 30, 40 ou plus de travailleurs dont des journalistes et techniciens, il est important d’avoir des sujets pointus qui pourraient aider le public à mieux être informé, situé et orienté sur ce qui les entoure. Mais pas de travailler comme ceux qui ne sont pas du domaine, c’est-à-dire prendre n’importe quoi et n’importe où pour mettre sur la place publique sans des enquêtes préliminaires. Aujourd’hui malheureusement, c’est un peu le cas en Guinée avec certains organes de presse qui, parfois le personnel se résume exclusivement au fondateur ou administrateur qui ne fait que copier-coller ce que les autres ont fait sans même citer la source d’information, (faute grave en étant professionnel).
Par exemple, faisons cap sur un média international notamment ‘’MEDIAPART’’ créé en 2008 par un groupe de journalistes renommés. Ce média indépendant qui se distingue des autres de par la qualité de ses informations surtout les enquêtes, qui, font trembler des responsables français. Lors d’une interview avec les journalistes du JDN, Edwy Plenel, Co-fondateur, a indiqué que MEDIAPART a en son sein 54 salariés en contrat à durée indéterminée (CDI), dont 34 journalistes, plus de 105.000 abonnées et une vingtaine de free-lance en 2014. Cette qualité à privilégier l’intérêt public, aura permis à ce médium de se faire une place de choix dans le paysage médiatique européen. Mais en Guinée, combien de journalistes ont des contrats dûment signés avant de parler de contrats à durée indéterminée ? Pensons y !
L’intérêt pour la question est d’autant plus grand que la qualité serait rentable : de nombreuses analyses, surtout américaines, relèvent en effet que le journalisme de qualité peut avoir des répercussions économiques positives. PERTILLA et BELT avancent ainsi que les stations de télévision locales qui misent davantage sur la qualité s’assurent d’un public plus fidèle et plus étendu. (PERTILLA et BELT, 2002).
A la recherche de l’impact
Dans le manuel ‘’La qualité du journalisme vue par ceux qui le pratiquent’’ de Philippe Marcotte publié en juin 2008, tous les journalistes sont d’accord sur le principe qui dit que les médias d’information ont une certaine responsabilité sociale qu’ils doivent, de manière plus ou moins active, veiller au bon ordre des choses, à l’amélioration de la société, à la bonne marche de la démocratie. Dans cette optique, comme nous l’avons souligné, les journalistes valorisent souvent l’information qui mène au débat public ; plus exactement, les journalistes, tout comme les cadres, recherchent surtout l’information qui aura de l’«impact», cette notion revenant fréquemment dans leur discours. Cependant, les journalistes visent autant le «petit » que le «grand» impact, et les «grands objectifs du journalisme» s’accompagnent aussi d’objectifs plus pragmatiques. Un cadre de la presse écrite montre bien cette double portée de la fonction sociale du journalisme : il affirme qu’il est primordial d’être « le chien de garde de la démocratie», et ajoute par la suite qu’il faut aussi être « le chien de garde des consommateurs », car : « on a un rôle social à tous les points de vue », conclut-il.
Pour les journalistes et leurs patrons, « le principe journalistique de défendre les intérêts des citoyens est important » ; ils souhaitent ainsi «être à la défense du citoyen et ce à tous les points de vue, autant au niveau fiscal qu’au niveau environnemental », par exemple, c’est que le public, fondamentalement, a besoin du journalisme:
‘’Le journalisme, c’est dénicher une histoire cachée que les gens veulent savoir mais qu’ils n’ont pas de moyens autre de le savoir que grâce à leurs journalistes. Les gens se fient sur les médias pour bien faire fonctionner la démocratie. La démocratie, ça veut dire le gouvernement, qui est de plus en plus équipé en relationnistes, en manière de déjouer les médias. Le public se fie sur nous pour talonner le gouvernement pour qu’il dépense comme il faut leur argent, qu’il ne le gaspille pas et qu’il l’investisse aux bons endroits. Et déterminer ces bons endroits nécessite souvent des débats de société’’. C’est pourquoi, les journalistes que nous sommes, devrons privilégier l’intérêt public en diversifiant les sujets à traiter au quotidien sinon vouloir se contenter de peu ou de répéter ce que tout le monde dit, l’on se questionne où se trouve véritablement certains hommes de la plume et du micro. De ce fait, il est temps d’inverser la tendance en touchant surtout les sujets liés à la vie communautaire que de rester globalement sur la politique, la politique et rien que la politique.
Utilité publique
Parcourant le même manuel, il est mentionné pour les journalistes innovateurs, que le journalisme de qualité ne se limite pas à l’« actualité », aux « nouvelles », aux événements survenus récemment dans l’espace public : « de l’information, ce n’est pas seulement un reportage », le journalisme doit également permettre d’« apprendre des choses au-delà de l’actualité [sur la santé entre autres] ».
On n’essaie pas d’éduquer le lecteur, je ne pense pas que ce soit notre responsabilité. Il faut plutôt répondre au besoin d’information du public; l’être humain a un besoin d’information. On parle souvent du droit du public à l’information, c’est vrai, mais il y a aussi le besoin du public à l’information. Quand on se lève le matin, on est curieux. Il y a des choses sur lesquelles tu veux avoir de l’information, et ce n’est pas toujours d’une importance capitale. Il faut alors agir pour répondre à ce besoin.
Soulignons d’abord que la définition de l’intérêt public que proposent les innovateurs rompt avec ce que plusieurs considèrent comme l’un des canons du journalisme, soit la séparation de l’intérêt public et de l’intérêt du public (ou la curiosité du public). Il est largement convenu et enseigné dans les universités que le journalisme a le devoir de privilégier « ce que le public doit savoir » plutôt que « ce que le public veut savoir » : l’information doit être d’intérêt public, et non répondre aux intérêts du public, en particulier à ses intérêts parfois moins « nobles » (sa curiosité, son voyeurisme).
Dans un texte sur « l’idéal journalistique», Marc-François Bernier fait un large tour de la question, en citant notamment Pierre Sormany, « qui reprend une distinction devenue classique en invitant à ne pas “confondre l’intérêt d’une information pour le public avec la notion d’intérêt public ! La presse à sensation franchit souvent cette frontière entre ce qui n’a qu’un intérêt anecdotique et ce qui est significatif ”».
Bernier cite également les propos de l’éditorialiste en chef de La Presse, André Pratte, qui souligne pour sa part qu’il y a « contradiction entre l’intérêt public et ce qui intéresse spontanément le public. L’intérêt public exige que l’information élargisse les horizons de la population pour lui permettre de mieux se situer, de mieux comprendre le monde et la société dans laquelle elle vit. Au contraire, une information qui cherche seulement à attirer de nouveaux clients les renvoie constamment à eux-mêmes, tels que la société les a moulés. (Bernier, 2006)
Parler de l’intérêt public de l’information me semble vaste, mais toujours est-il que pour une presse qui voudrait se démarquer des autres devrait privilégier de mieux choisir les sujets à traiter de manière approfondie, vérifiée qui va impacter positivement l’opinion. C’est mieux que de se limiter à un simple compte-rendu, reportage, publireportage, interview parfois avec des questions qui laissent à désirer. Tel est un choix d’informer le public, tel qu’il faut mettre le paquet pour satisfaire le public car il a le droit d’être informé accompagné du besoin et nous avons en tant que journalistes le devoir d’informer.
En Guinée, est-ce que l’intérêt public est-il privilégié ou pas ? Aidez-nous à comprendre et repensons ensemble autrement !.
Mamadou Adama BARRY
Journaliste et Mastérant Communication Publique et Politique