Rencontré pour son témoignage par la rédaction d’inquisiteur.net, sur la période de l’indépendance, le doyen Elhadj Biro Kanté, révèle que tous ceux qui sont morts au Camp Boiro, sont des victimes de la France. Le compagnon de l’indépendance a, dans la même interview, affirmé que l’actuel président Alpha Condé, ne sera jamais tranquille dans son fauteuil, tant qu’il ne reconnait pas Sekou Touré comme le heros qui a libéré la Guinée et l’Afrique. Lisez!
Elhadj Biro Kanté, fait partie des rares compagnons de l’indépendance qui sont encore en vie. Notre rédaction l’a rencontré à l’occasion du 61ème anniversaire de l’indépendance de la Guinée, pour rouvrir les pages de l’histoire de l’accession à la souveraineté.
Tout d’abord, le militant de la révolution, rappelle que durant 26 ans, Sekou Touré et ses collègues, ont souffert pour les autres Etats africains, et que la Guinée a perdu des cadres aux côtés de ces pays.
« Quand je vois le président de la Guinée, dire qu’il est Mandela (…), le président Sékou Touré, a plus de mérite dans la libération de l’Afrique que Nelson Mandela. Nos militaires sont allés se battre en Angola, au Zaïre (actuel République démocratique du Congo), etc. La Guinée de Sékou Touré a fait le maximum. Soyez fiers que vous avez eu un homme comme Sékou Touré! C’est un don du ciel qu’on n’aura pas pendant trois ou quatre générations. Il n’a rien aimé que le bonheur et la dignité pour le peuple », témoigne Elhadj Biro Kanté.
L’ancien compagnon du père de l’indépendance guinéenne dans le même entretien, a laissé entendre ceci :
« Tous ceux qui sont morts au camp Boiro, sont des victimes de la France contre la liberté de la Guinée et l’Afrique ».
Pour lui, il est impératif de reconnaitre Ahmed Sekou Touré comme un héro de l’histoire de la Guinée et de l’Afrique. Il exhorte donc à Alpha Condé, d’honorer la mémoire du Camarade Sékou Touré.
« Tant que le président Alpha Condé ne proclame pas Sékou Touré comme héro national, comme celui qui a libéré la Guinée et l’Afrique (…), tant qu’il ne le fait pas, il ne sera pas tranquille dans son fauteuil. Il ne faut pas qu’il ait peur. Ce n’est pas la France qui a fait élire Alpha Condé. Je peux le garantir ! J’étais membre de la CENI lors des premiers tours (Présidentielles de 2010). Sarkozy qui était président de la République et deux autres Chefs d’Etat africains ont tout fait pour qu’Alpha Condé ne passe pas », révèle Biro Kanté.
Qui sont les compagnons de lutte d’Ahmed Sékou Touré ?
Ils sont entre autres : Barry Diawadou, Barry 3, Saifoulaye Diallo, Lansana Béavogui, Damantang Camara et autres…, cite Elhadj Biro Kanté. Il précise que ces cadres, compagnons de l’indépendance comme lui, n’ont pas été obligés d’accompagner le président, contrairement à ce que d’aucuns relatent.
« Par conséquent, il faut signaler que certains Guinéens s’étaient opposés à la décision de Feu Ahmed Sékou Touré, qui consistait à dire ‘’NON’’ au président Français. Il y a eu certains chefs coutumiers, les chefs de canton et certains cadres. Ce sont ces gens-là, qui se sont opposés au référendum. C’est après même le coup d’Etat militaire qu’on a compris que ceux-ci s’étaient opposés », informe le vieil homme.
Son point de vue sur l’actuelle constitution
Selon les constitutionalistes hongrois, la première constitution guinéenne (sous le régime de Sékou Touré), était l’une des meilleures constitutions au monde, informe Elhadj Biro. Cette constitution a été modifiée, continue-t-il.
« Mais une constitution se modifie selon le contexte social ou économique, et les besoins des hommes. Cette constitution en vigueur, a été élaborée sans notre avis, sans notre consentement et sans notre participation. Dans notre mémorandum lors des consultations, nous avons dit que le PDG-RDA, opte pour le septennat du mandat présidentiel renouvelable une fois », affirme Elhadj Biro.
Cette proposition, l’ancien Gouverneur de région sous la révolution, la défend par l’argument comme quoi, quand quelqu’un fait deux mandats de 14 ans, ce qu’il n’a pas pu faire en ce temps, ne se fera jamais même en 20 ans.
« Les mandats de 5 ans sont bien seulement pour la France. Les Etats-Unis…, eux, ils ont fini de travailler. Si le mandat était de 7 ans, renouvelable une fois, Alpha Condé n’allait pas se représenter. Vous remarquerez avec moi que les 5 premières années, il (Alpha Condé), n’a pas pu travailler, l’opposition a pris la rue… », souligne le révolutionnaire.
Le « NON » au référendum Français ou la réclamation de l’indépendance, est souvent pointé du doigt comme l’une des causes du retard de la Guinée. Sur ces analyses, Elhadj Biro Kanté, déclare :
«Si la Guinée est en retard comme le pensent certains, cela n’est pas dû aux luttes menées par Ahmed Sékou Touré et ses compagnons de toute façon. En réalité, les responsables Guinéens, ont cessé d’être des patriotes. Ils cherchent tous des places ou devenir président. Mais tout le monde ne peut pas être à la fois président sinon la Guinée est riche. Si nous fermons les frontières, rien ne sort de la Guinée, le Mali, le Sénégal et la Côte-d’Ivoire pleureront. La Guinée investi plus d’argent dans nos routes que n’importe quel pays. Les chemins de fer ont été enlevés… Cela devait être le premier travail du gouvernement. A cela, s’ajoute l’atmosphère politique, on ne nous laisse pas le temps de réfléchir et de travailler », déplore notre interlocuteur.
Plein de souvenir, le camarade Biro Kanté, vit ce 61ème anniversaire de l’indépendance avec assez de chagrin et de regret au regard de la gestion du pays et de ce qui se dit sur le père de l’indépendance.
Mariam KANTE